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Entretien avec Amadou & Mariam

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Dans le cadre de leur concert au Creusot fin août, CurioCity a pu échanger avec Amadou & Mariam.

Comment êtes-vous arrivés à la musique ? 

Amadou : J’ai commencé pour ma part la musique très tôt (à l’âge de deux ans) par les percussions. Quand j’avais dix ans, j’ai découvert l’harmonica et la flûte. Puis à quatorze ans, je me suis orienté vers le chant et la guitare. J’ai ensuite intégré des orchestres au Mali : l’Orchestre national, celui de Koutiala… Et puis je suis entré à l’Institut des jeunes aveugles dans les années 70 où j’ai rencontré Mariam. Par la suite, on a continué à cheminer ensemble.

Mariam : Pour ma part, je dirais que la musique est venue très tôt dans ma vie également. Dès l’âge de six ans, je chantais. J’écoutais énormément la radio avec mon père et j’imitais les chanteurs et chanteuses que j’entendais. J’ai été appelé pour des manifestations telles que des mariages, baptêmes, etc. Après cela, l’Institut des jeunes aveugles a fait appel à moi. Je suis allé là-bas pour apprendre le braille et après les cours, on m’a confié des élèves. Je leur apprenais à chanter et danser. C’est là-bas qu’on s’est rencontré Amadou et moi. On a ensuite enchaîné les concerts un peu partout, créé un groupe rassemblant voyants et aveugles. Ce chœur s’appelait Éclipse. Puis on a continué à faire la musique ensemble en duo.

CurioCity : Et actuellement, vous vivez plus en France ou au Mali ?

Mariam : On passe beaucoup plus de temps en France qu’au Mali. Mais lorsque nous n’avons pas d’évènements, nous retournons là-bas évidemment.

Amadou : En fait, nous voyageons beaucoup. On fait certes beaucoup de concert en France, mais aussi en Angleterre, en Europe ou bien aux États-Unis par exemple.

CurioCity : J’ai le sentiment que la musique est une affaire de famille chez vous. Je me trompe ? 

Amadou : En fait, pas vraiment. Nous nous faisons de la musique en couple, mais notre fils, qui chante aussi, a son propre univers et sa propre approche de la musique. Chacun est libre d’exploiter son don à sa manière.

CurioCity : Vous vous engagez énormément humanitairement. On peut dire que cela fait partie de votre ADN.

Mariam : C’est effectivement très important pour nous. On a fait beaucoup de shows humanitaires au fil des années. On est à titre d’exemple des ambassadeurs de la drépanocytose. Mais avant ça, on participait aussi à d’autres festivals. Par exemple, chaque année, on invitait les gens au Mali et on donnait du matériel et de l’argent à ceux qui en avaient besoin. Ce festival s’appelait Paris Bamako.

Amadou : Le fait de faire de l’humanitaire nous plaît beaucoup effectivement, car nous représentons beaucoup de choses. En tant qu’aveugle, on essaye de soutenir bien évidemment la cause des non-voyants et puis grâce à notre statut de chanteur reconnu sur le plan international, nous sommes également devenus ambassadeurs du Programme alimentaire mondial. Nous avons parrainé beaucoup de choses et fait de nombreux concerts pour soutenir des projets humanitaires.

CurioCity : On vous voit souvent associé sur scène à d’autres artistes. Au fur et à mesure des années, vous avez effectué beaucoup de collaborations. C’est aussi quelque chose que vous aimez particulièrement faire aussi, j’imagine. Une des dernières collaborations en date est avec Christophe Maé. Comme cela s’est fait et quelle collaboration vous a le plus marqué ?

Mariam : On aime beaucoup faire des collaborations, mais ce sont plutôt les artistes qui prennent contact avec nous en réalité. Christophe Maé est notre dernière collaboration effectivement. Avant lui, il y a eu évidemment Manu Chao qui nous a offert Dimanche à Bamako (qui a eu le succès que vous connaissez). Pour revenir brièvement à notre rencontre avec lui spécifiquement : il est tombé en écoutant la radio sur notre musique et a pris contact avec nous pour qu’on puisse enregistrer des choses ensemble. On a eu par la suite bien évidemment d’autres belles collaborations avec M ou encore Sergent Garcia par exemple.

Amadou : Pour revenir à Christophe Maé, on parlait de faire des choses avec lui depuis plusieurs années. On a pris le temps d’échanger avec lui il y a peu pour construire enfin quelque chose ensemble. Vous savez, ce qui nous motive c’est de mélanger les styles, les cultures parce que nous pensons que le mélange donne de l’inspiration et des couleurs à la musique.

CurioCity : C’est certain. Dernièrement, vous avez également collaboré avec Oxmo Puccino sur un projet qui s’appelle Éclipse. Comment est-il né ? 

Mariam : Le projet est né du groupe que nous avions monté au Mali que j’évoquais tout à l’heure et qui rassemblait voyants et non-voyants. On faisait pas mal de concerts au Mali avec cette formation et on avait envie de développer le concept au-delà de nos frontières.

Amadou : Le but avec Eclipse était de plonger tout le monde dans le noir pour que les gens puissent vivre, le temps d’un concert, le quotidien des aveugles. Il y a une partie biographique (parlée) et de la musique. 

Mariam : Oui, c’est ça. Il y a beaucoup de choses qui évoquent notre vie à Bamako et notre parcours musical. Au total, on a fait une dizaine de concerts en Angleterre, au Portugal, en Belgique, en Australie et en France aussi. C’était une belle expérience. 

CurioCity : Une dernière question, en préparant cette interview, je suis tombé sur une interview que vous aviez fait à Taratata il y a quelques années où vous parliez énormément de Stevie Wonder. Est-ce qu’il y a des artistes avec qui vous voudriez collaborer et/ou qui vous ont vraiment influencé dans votre musique ?

Amadou : Ray Charles est un artiste que l’on apprécie énormément. Sinon, nous avons déjà de nombreuses collaborations à notre actif, même si nous sommes toujours en quête de nouvelles rencontres. Comme l’a dit Mariam plus tôt, tout se fait au feeling au niveau des collaborations.

Mariam : Ceci dit, on a déjà joué avec Ray Charles et Stevie Wonder chez lui.

Amadou : C’est vrai !

CurioCity : Intéressant. Merci à vous pour cet échange en tout cas et bon concert au Creusot !