C’était effectivement un sujet de conférence « feel good », comme l’a souligné en boutade le modérateur et animateur du débat, Jean Birnbaum, en introduction de cet événement organisé vendredi dernier dans le cadre du Festival international de la BD 2025…
Sous haute surveillance (l’événement étant particulièrement sécurisé), Coco (dessinatrice pour Libération et Charlie Hebdo) et Riss (directeur de la publication de Charlie Hebdo) arrivent sur la scène de l’Espace Franquin d’Angoulême. Ils sont rapidement rejoints par Lisa Mandel (dessinatrice pour Le Nouvel Obs), sous des applaudissements nourris.
Comme on pouvait s’y attendre, dès les premières minutes, le débat prend des airs de commémoration, au vu des invités présents autour de la table. Jean Birnbaum les qualifie (maladroitement, il faut le dire) de « survivants » de l’attentat contre Charlie Hebdo – une formulation factuellement juste, mais lourde de sens… L’émotion est palpable : leurs visages fermés et graves traduisent combien cette « étiquette » les a secoués.
Mais très vite, l’échange reprend un ton plus apaisé lorsque les trois invités évoquent leur vision du dessin de presse et son importance en France. Chacun et chacune partage son regard sur la profession, discute de certains dessins marquants et explique sa ligne éditoriale, ses limites (ou leur absence) lorsqu’il dessine. C’était passionnant d’entrer, le temps d’un débat, dans leur processus de réflexion.
Un autre sujet longuement abordé : la censure et, par extension, l’auto-censure. Une épée de Damoclès qui plane de plus en plus au-dessus des dessinateurs et dessinatrices, suscitant chez eux une inquiétude bien réelle, même si tous restent optimistes quant à l’avenir.
Parmi les moments marquants de cette conférence, nous retiendrons la réponse touchante de Coco lorsqu’on lui a demandé si elle regrettait un dessin en particulier. Elle a choisi d’évoquer l’une de ses œuvres les plus populaires, montrée par Samuel Paty à ses élèves. Un dessin qu’elle avait apprécié créer sur le moment, mais qui, par un terrible enchaînement d’événements, a conduit à un drame. Un grand silence s’est installé dans la salle à cet instant. Mais comme elle l’a elle-même conclu : « Ce n’est pas mon dessin qui l’a tué, c’est l’obscurantisme. » Des mots forts qui nous ont, en quelque sorte, rassurés.
Bravo, Madame, pour votre courage. Et plus largement, bravo à toutes les dessinatrices et dessinateurs de presse, en France et ailleurs, pour leur travail quotidien.